Gratounette à canaux

Le SAF (Self Ajusting File) est un instrument endodontique véritablement révolutionnaire, mis au point par le professeur Zvi Metzger de la faculté de Tel Aviv (Israël) et son équipe. Cette lime en nickel-titane est élaborée selon le principe des stents, ces petits tubes maillés que l’on insère dans les vaisseaux cardiaques pour les maintenir ouverts. Elle a la forme d’un long fuseau constitué d’un treillis métallique, élastique et souple capable de se comprimer dans le sens transversal. Sa surface présente de minuscules aspérités censées abraser la dentine. Ainsi l’instrument peut-il s’introduire sans difficulté dans un canal relativement étroit au départ, et, en usinant petit à petit ses parois, occuper un espace 2 ou 3 fois plus large en fin de préparation.

La SAF s’utilise sur un contre-angle produisant un mouvement spécifique : lorsque l’on actionne la pédale de commande, la lime tourne lentement comme n’importe quel instrument rotatif. Mais cette rotation n’est pas forcée. Elle cesse dès que l’instrument subit une pression et ne sert qu’à lui permettre de s’engager dans le canal selon la meilleure orientation, car sa pointe est légèrement asymétrique. Une fois dans la dent, la lime effectue un mouvement de va et vient axial de très faible amplitude.

Le tableau ne serait pas complet si l’on ne mentionnait le dernier élément fondamental du système : le dispositif d’irrigation. Une petite unité séparée contient un réservoir d’hypochlorite et une pompe qui propulse l’irrigant dans un tuyau fixé sous le contre-angle jusqu’à la lime. Celle-ci est creuse et la solution passe directement dans le corps de la SAF. Un panneau de contrôle à affichage numérique indique le débit de la pompe. On la déclenche au moyen d’un bouton sur le boîtier.

Les SAF n’existent qu’en un seul diamètre, mais en trois longueurs (21, 25 et 31 mm). Le fabricant recommande de préparer d’abord la racine avec une lime n° 20 à la longueur de travail, puis d’en élargir l’entrée avec un foret de Gates n° 2. La SAF s’utilise ensuite durant 4 minutes par canal.

De nombreuses études illustrent les deux principaux avantages du système : un élargissement parfaitement homothétique des canaux, même ceux de section plate, ovale ou en C, et une élimination optimale des débris dentinaires et pulpaires à tous les niveaux.

De ce point de vue, les inventeurs annoncent des résultats très supérieurs à ceux obtenus avec les limes NiTi rotatives de forte conicité qui surinstrumentent la partie centrale des canaux et laissent des débris dans les zones extrêmes inaccessibles.

Autre avantage de cette lime, sa très grande sécurité d’utilisation. Si l’on exagère la pression axiale jusqu’à la rupture, le treillis de fragmente par endroits, mais aucun morceau de métal ne se sépare de l’instrument ni ne se coince dans le canal.

À l’usage, la SAF se révèle plutôt agréable à utiliser, mais sa capacité d’usinage est assez réduite : l’élargissement du canal paraît interminable. N’éliminer que le strict nécessaire et le faire parfaitement est le premier argument des concepteurs. Une notion bien séduisante qui a ses limites. Sur une dent vivante dont la dentine est stérile, pourquoi pas. Mais sur un canal infecté avec des parois envahies de bactéries sur une certaine profondeur, on peut avoir quelques doutes. En termes d’irrigation, le système est en revanche parfaitement opérationnel et tout à fait enthousiasmant. Encore faudrait-il que la mise en marche de la pompe soit couplée avec celle du contre-angle, ce qui pour l’heure, n’est pas le cas.