Clinic n° 03 du 01/03/2024

 

Dermatologie

Buccale

Djalel AOUADI*   Elhadi BOUALI**   Farouk GHEZAL***   Zahia BOUDAOUD****   Philippe LESCLOUS*****  


*Maître-assistant en Pathologie et Chirurgie buccales, Hôpital central de l’Armée, Alger, Algérie.
**Résident en Pathologie et Chirurgie buccales, Hôpital central de l’Armée, Alger, Algérie.
***Professeur en Pathologie et Chirurgie buccales, Hôpital central de l’Armée, Alger, Algérie.
****Professeur en Pathologie et Chirurgie buccales, CHU Mustapha Pacha, Alger, Algérie.

Les glandes salivaires accessoires, disséminées dans l’ensemble des voies aérodigestives supérieures, peuvent être le siège de tumeurs, principalement au niveau de la muqueuse buccale (voûte ou voile du palais, plancher buccal, joues, lèvres), plus rarement du larynx ou des fosses nasales.

Les variétés tumorales sont nombreuses et la plus courante est l’adénome pléomorphe (AP), tumeur bénigne qui récidive dans de rares cas et peut se transformer en carcinome après...


Les glandes salivaires accessoires, disséminées dans l’ensemble des voies aérodigestives supérieures, peuvent être le siège de tumeurs, principalement au niveau de la muqueuse buccale (voûte ou voile du palais, plancher buccal, joues, lèvres), plus rarement du larynx ou des fosses nasales.

Les variétés tumorales sont nombreuses et la plus courante est l’adénome pléomorphe (AP), tumeur bénigne qui récidive dans de rares cas et peut se transformer en carcinome après une longue évolution [1].

OBSERVATION

Un patient âgé de 54 ans, sans antécédents médico-chirurgicaux particuliers, consulte pour une lésion au niveau de la face interne de la joue gauche évoluant depuis plusieurs années. Elle était indolore et d’installation progressive.

L’examen clinique exobuccal montre une asymétrie faciale en rapport avec une tuméfaction naso-génienne gauche (figure 1).

En endobuccal, on note la présence d’une lésion nodulaire au niveau de la face interne de la joue gauche, bien limitée, et recouverte par une muqueuse d’aspect sain. Le sillon gingivo-jugal est libre (figure 2).

À la palpation, cette masse est indolore, ferme, mobilisable et non adhérente à la table vestibulaire. Le diagnostic d’AP est alors avancé.

Les dents 24 et 25 sont à l’état de racine.

La radiographie panoramique montre de multiples images péri-apicales, notamment dans la région maxillaire gauche (figure 3).

PRISE EN CHARGE

Une exérèse de la lésion jugale gauche sous anesthésie locale par voie endobuccale a été pratiquée. Après une incision horizontale d’environ 3 cm sur la muqueuse jugale et le repérage du plan de clivage, la masse a pu être extirpée complètement, sans rupture capsulaire (figure 4).

Les suites opératoires ont été simples.

L’examen histologique confirme le diagnostic d’adénome pléomorphe (figure 5).

Le patient a été revu 1 an après pour un contrôle. Aucune récidivé n’a été signalée.

DISCUSSION

L’AP est la tumeur bénigne la plus fréquente des glandes salivaires, longtemps dénommée tumeur mixte du fait de sa double composante épithéliale et mésenchymateuse [2].

Le site le plus courant d’AP des glandes salivaires accessoires est le palais suivi des lèvres, de la muqueuse du plancher buccal, de la langue, de l’amygdale, du pharynx, de la région rétro-molaire et de la cavité nasale [3].

La tumeur survient généralement entre la quatrième et la sixième décennie et se retrouve plus fréquemment chez les femmes [3].

Cliniquement, l’AP de la joue se présente généralement comme un gonflement sous-muqueux à croissance lente, indolore, ferme, lobulé et mobile. Sa consistance est variable. Sa taille varie également de 1 à 7 cm de diamètre et peut atteindre parfois une taille importante [3].

Dans le cas rapporté ici, la tumeur était peu gênante, sans interférence avec la déglutition et la phonation. Cela explique le diagnostic tardif jusqu’à l’apparition d’une déformation esthétique notable.

L’exploration préopératoire de l’AP repose essentiellement sur la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique [4]. Elle permet d’évaluer l’extension de la tumeur par rapport aux tissus avoisinants [2].

Dans le cas présenté, la radiographie panoramique a conforté l’examen clinique en éliminant une participation osseuse et dentaire dans la lésion.

Histologiquement, l’AP a trois sous-types histologiques : myxoïde (80 % de stroma), cellulaire (cellules myoépithéliales prédominantes) et mixte (classique) [3].

La prise en charge est essentiellement chirurgicale : l’excision avec une marge adéquate de tissu environnant normal est le traitement de choix pour l’AP de la joue [3].Cette exérèse est rendue difficile, quand il s’agit de tumeurs volumineuses, par l’absence de capsule et l’infiltration entre les fibres musculaires et les pannicules adipeux [2].

Le pronostic de l’AP est généralement bon mais reste marqué par un risque de récidive. Une dégénérescence carcinomateuse est possible [5].

Dans le cas rapporté, la masse était encapsulée, située entre la muqueuse de la joue et le muscle buccinateur, évoquant une tumeur bénigne d’origine glandulaire. Elle a été excisée avec sa capsule intacte.

CONCLUSION

L’adénome pléomorphe de la joue est une tumeur rare qui doit être évoquée dans le diagnostic différentiel des lésions nodulaires de la joue. L’excision chirurgicale locale large et complète est le traitement de choix. Les patients doivent être suivis pendant une période assez longue en raison de la possibilité de récidives tardives.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Nouri H, Raji A, Elhattab Y, Rochdi Y, Ait M’barek B. Adénome pléomorphe de la voûte palatine : à propos d’un cas. Rev Oto-Rhinolaryngol Chir Cervico-Fac 2006;302:22-23.
  • 2. Dah Cherif A, Chouche M, Barbach Y, Elloudi S, Baybay H, Mernissi FZ. L’adénome pléomorphe de la glande salivaire accessoire. À propos d’un cas et revue de la littérature. Our Dermatol Online 2019;10(e):e20.1-e20.4
  • 3. Periasamy S, Manoharan A, Garg H, Kumar S. Pleomorphic adenoma of the cheek: A case report. Cureus 2019;11(8):e5312. [doi:10.7759/cureus.5312]
  • 4. Prades JM, Oletski A, Faye MB, Dumollard JM, Timoshenko AP, Veyret C. Morphologie IRM des tuméfactions de la glande parotide. Corrélations histopathologiques. Original research article. Morphologie 2007;91:44-51.
  • 5. Moukram K, El Bouhairi M, Yahya IB. Les localisations rares de l’adénome pléomorphe : à propos de 4 cas cliniques. Actu Odonto-Stomatol 2017;(285):5.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts.