Première étude sur l’efficacité des biocéramiques utilisées en obturation canalaire orthograde à l’aide de la technique mono-cône à froid - Clinic n° 04 du 01/04/2021
 

Clinic n° 04 du 01/04/2021

 

Revue de presse

Internationale

Philippe FRANCOIS  

L’obturation endodontique fait partie d’une des trois étapes clés décrites par Schilder et comprenant désinfection, mise en forme et obturation. C’est donc une des étapes clés du traitement canalaire. Cette obturation tridimensionnelle et étanche du système endodontique, complexe par nature (isthmes, canaux accessoires et latéraux…), est essentielle afin de limiter l’espace disponible permettant une prolifération bactérienne. Depuis maintenant plus de 10 ans, les ciments...


L’obturation endodontique fait partie d’une des trois étapes clés décrites par Schilder et comprenant désinfection, mise en forme et obturation. C’est donc une des étapes clés du traitement canalaire. Cette obturation tridimensionnelle et étanche du système endodontique, complexe par nature (isthmes, canaux accessoires et latéraux…), est essentielle afin de limiter l’espace disponible permettant une prolifération bactérienne. Depuis maintenant plus de 10 ans, les ciments d’obturation biocéramique, associés à une technique mono-cône à froid, sont apparus sur le marché et cette étude rétrospective est la première étude clinique de grande ampleur à donner des informations quant au taux de succès de ces obturations.

OBJECTIF DE L’ÉTUDE

L’objectif de cette étude était d’évaluer le succès de traitements endodontiques orthogrades utilisant la technique mono-cône à froid associée à un ciment d’obturation biocéramique (Endosequence BC Sealer®, Brasseler/Busa) et d’identifier les facteurs associés au succès ou à l’échec du traitement endodontique orthograde.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Cette étude rétrospective, sans groupe contrôle, a été réalisée par des praticiens spécialisés en endodontie. Elle inclut des patients suivis entre 2009 et 2015, adressés pour des traitements ou des retraitements endodontiques orthogrades et dont la qualité radiographique post-opératoire des traitements était satisfaisante. Les facteurs cliniques (sexe, type de dent, type de traitement, état péri-apical) et observés lors du traitement (extrusion de ciment, taille de la lésion) ont été analysés pour déterminer leur importance en tant que facteurs pronostiques.

Le succès a été évalué sur la base de l’examen clinique et des résultats radiographiques au rappel. Les dents ont été classées comme guéries, en cours de guérison (et ainsi considérées comme un succès) ou non guéries (considérées comme un échec). Des tests statistiques adéquats ont été réalisés.

RÉSULTATS

Trois cent sept dents ont été incluses dans l’analyse et la durée moyenne du suivi était de 30,1 mois. Le taux de succès global des traitements endodontiques était de 90,9 %. Les lésions dont la taille était inférieure à 5 mm de diamètre ont montré une plus grande propension à guérir que les lésions de plus de 5 mm de diamètre. L’extrusion de ciment de scellement a été observée dans 47,4 % des cas et n’est pas un facteur pronostique quant à la cicatrisation obtenue suite au traitement.

CONCLUSION

Le taux de succès obtenu dans cette étude par l’association gutta-percha/ciment de scellement biocéramique est important et suggère que cette technique d’obturation pourrait être une alternative viable à la condensation verticale à chaud.

Pertinence Clinique

Pour obtenir l’étanchéité du système endodontique à la fin de leur traitement, la plupart des praticiens utilisent au quotidien le couple gutta-percha réchauffée (plastifiée sous l’effet de la chaleur, non résorbable et non adhérente aux parois) + ciment canalaire d’obturation « conventionnel » (résistant à la chaleur, résorbable mais adhérent aux parois). Jusqu’à présent, cette technique appelée obturation verticale à chaud était considérée comme le gold standard en endodontie : elle repose sur l’apport de chaleur afin de maximiser la quantité de gutta-percha non résorbable dans le système endodontique tout en utilisant le ciment d’obturation en fine épaisseur pour assurer l’étanchéité interfaciale. Cette technique a été validée par une étude rétrospective de grande étendue, la Toronto Study.

Alors qu’elles sont maintenant étudiées in vitro et présentes sur le marché depuis plus de 10 ans, les biocéramiques d’obturation endodontiques n’ont été que peu étudiées concernant leur succès clinique. Grâce à certaines de leurs propriétés biologiques et physico-chimiques (incluant notamment bio-activité, expansion de prise et faible résorbabilité), ces ciments ont été proposés en obturation mono-cône à froid sur le postulat que le ciment, habituel talon d’Achille de l’obturation, pouvait être ainsi présent en plus grande quantité dans le système endodontique. Cette étude est la première à montrer de hauts taux de succès associés à une obturation mono-cône à froid/ciment d’obturation biocéramique. Cependant, l’absence de groupe contrôle, son caractère rétrospectif ainsi qu’un éventuel biais de sélection (uniquement les traitements satisfaisants radiographiquement) ne permettent pas de la comparer définitivement à l’obturation verticale à chaud.

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