Clinic n° 05 du 01/05/2016

 

Patrimoine

Catherine BEL*   Me Jérôme Truchot**  


*PATRIMOINE PREMIER
CIF réf. sous n° A043000
par la CIP Assoc. agréée par l’AMF
catherinebel@patrimoinepremier.com
**Avocat à la cour, cabinet fidal

La location meublée a le vent en poupe ces derniers temps ! Effectivement, les raisons de la plébisciter sont nombreuses, tant économiques que fiscales. Mais voici d’autres avantages qui pourraient bien joliment parachever ce statut aux multiples facettes !

Tout d’abord, rappelons qu’économiquement, soit vous êtes en location de courte durée du type touristique, et la rentabilité est plutôt sympathique (sous réserve des autorisations requises bien sûr, sinon attention aux amendes !), soit vous êtes en location gérée (avec exploitant) et, là aussi, la rentabilité est également sympathique. Dans les deux cas, les rentabilités flirtent et même dépassent les 4 %, selon les cas, ce qui, dans le contexte économique que nous connaissons, est tout à fait compétitif !

Location meublée : un cadre fiscal favorable…

À ce paysage plutôt agréable s’ajoutent des caractéristiques fiscales assez favorables : les revenus sont peu ou pas imposés grâce aux amortissements sur longue période. Les biens relevant de l’enveloppe meublée avec le statut de professionnel sont exonérés d’impôt sur la fortune (ISF) et, toujours dans le cadre du statut de loueur en meublé professionnel, les plus-values sont exonérées de taxe sur les plus-values dès lors que les biens sont détenus depuis au moins 5 ans… Restait la transmission, qui n’était pas simple.

Or, l’administration fiscale vient de préciser, dans une note (figurant dans plusieurs avis du Comité de l’abus de droit fiscal), que la location meublée avec ou sans prestations de services (ménage, petit-déjeuner, accueil…) peut bénéficier de l’exonération de droits de mutation prévue dans le cadre du dispositif « Dutreil/transmission », sous certaines conditions bien sûr. Il est vrai que cet avantage n’était plus d’actualité, ce qui était dommage car la détention d’immeubles nécessite souvent d’anticiper et de préparer leur transmission, tant en matière de coût que de « gestion des héritiers », afin d’éviter d’éventuels conflits.

Vers une exonération partielle des droits de mutation

Cette précision de l’Administration ouvre de nouvelles opportunités pour l’application du régime « ?Dutreil » que la prudence conseillait d’éviter de réaliser jusqu’à maintenant. Nous verrons toutefois qu’il y a lieu de prendre quelques précautions encore aujourd’hui.

Rappelons tout d’abord que les transmissions par décès et les donations de titres de sociétés ou d’entreprises individuelles ayant fait l’objet d’un engagement collectif de conservation, dans le cadre du pacte Dutreil, sont exonérées de droits de mutation à titre gratuit à concurrence des trois quarts de leur valeur.

Pour être éligible, les sociétés doivent exercer une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (article 787 B du Code général des impôts). Cette exonération partielle bénéficie également aux transmissions de biens meubles et immeubles affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle exerçant une activité de même nature (article 787 C du Code général des impôts).

Ainsi donc, la question se posait de savoir si la location meublée d’habitation relevait des activités pouvant bénéficier du dispositif « Dutreil/transmission », en d’autres termes, si elle répondait à la définition ci-dessus. On s’interrogeait notamment sur la nature civile ou commerciale de la location meublée.

Au regard du droit privé, la location meublée, qui constitue juridiquement une activité de nature civile, serait donc théoriquement exclue de ce dispositif.

Toutefois, la jurisprudence fiscale en la matière a affirmé, dès 1929, le caractère commercial par nature de la location meublée à titre habituel (Conseil d’État du 22 mars 1929, n° 98130). Une société civile donnant habituellement en location des locaux garnis de meubles doit être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l’article 34 du Code général des impôts (Conseil d’État du 28 décembre 2012, n° 347607).

Enfin, selon la doctrine administrative BOFIP (Bulletin officiel des finances publiques) relative au dispositif Dutreil, il semblait possible d’assimiler la location meublée à une activité commerciale pouvant bénéficier de ce dispositif dans la mesure où les revenus qu’elle dégage relèvent de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application des articles 34 et 35 du Code général des impôts.

Mais la doctrine administrative comportait peu d’indications sur le fait que la location meublée relevait ou non du dispositif Dutreil. Ainsi, selon l’Administration, les activités commerciales sont celles qui revêtent ce caractère en droit privé (ce qui ne serait donc pas le cas ici). Toutefois, elle précisait qu’il y a lieu de prendre également en considération les activités qui peuvent être regardées comme commerciales, c’est-à-dire celles dont les résultats sont soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (en application des articles 34 et 35 du Code général des impôts – BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 n° 10 ; BOI-PAT-ISF-30-30-10-10 n° 10s).

La rédaction actuelle du BOFIP ne permet pas d’établir avec certitude l’admissibilité de locations meublées au régime dit Dutreil. Or, seule le BOFIP est opposable à l’administration. Ce qui restait donc un peu gênant.

Mais, l’Administration fiscale vient de confirmer et donc d’enlever l’incertitude d’analyse ci-avant, à l’occasion des commentaires émis à l’égard de trois avis du Comité de l’abus de droit fiscal (comme vu plus haut), considérant que la location meublée doit être assimilée à une activité commerciale pour l’application du dispositif Dutreil prévu à l’article 787 B du Code général des impôts.

Vers une nouvelle voie d’exonération partielle d’ISF…

Ces commentaires administratifs viennent également confirmer le caractère admissible de la location meublée au dispositif Dutreil/ISF (article 885 1bis du Code général des impôts) d’exonération partielle d’ISF des titres de sociétés faisant l’objet d’un engagement de conservation.

Cette confirmation offre des perspectives d’autant plus intéressantes que pour l’application du régime Dutreil, il n’est pas exigé que l’activité admissible soit exercée à titre exclusif (du moins pour les sociétés anonymes à responsabilité limitée de famille soumise à l’impôt sur le revenu) mais il importe seulement qu’elle présente un caractère prépondérant (au moins 50 % au regard des critères du chiffre d’affaires et du montant de l’actif brut immobilisé). La détention en direct (hors structure sociétaire) a également ses vertus : il faut notamment un engagement de poursuite pendant 4 ans de l’activité par les bénéficiaires. Là aussi, c’est d’autant plus intéressant que la poursuite de l’activité doit se faire de manière habituelle et principale. Ce qui n’empêche pas d’avoir plusieurs activités. Le critère à remplir pour votre location meublée dans le cadre du pacte Dutreil sera le temps et les responsabilités consacrés à cette activité.

Ainsi, de nouvelles pistes de réflexion sont, dès à présent, à explorer avec vos conseils afin de compléter vos stratégies d’investissement en location meublée avec ces nouvelles facettes (ISF et transmission).

Toutefois, la prudence conduira à attendre que l’Administration fiscale en tire toutes les conséquences et modifie le BOFIP correspondant pour les mettre en application.

2 questions de lecteurs

Je suis propriétaire dans une résidence de tourisme et, au terme du bail, je vais récupérer mon appartement et le louer en meublé mais par moi-même. Je m’interroge sur la TVA car il reste encore 10 ans à courir. Quelles sont les solutions ?

Soit vous ne vous posez aucune autre question et vous remboursez la TVA restant à courir, le solde est peut-être important. Si c’est le cas, nous vous invitons à remplir les conditions suivantes pour ne pas être redevable de ce solde. Il suffit que vous mettiez en place un contrat avec un prestataire qui pourra fournir sur simple demande trois services sur quatre (c’est-à-dire l’accueil, le petit-déjeuner, le ménage et la fourniture du linge de maison) ou mettre en place plusieurs contrats proposant les services exigés. Ces contrats seront à conserver précieusement par-devers vous car ils seront la preuve que vous remplissez les conditions.

Je me suis marié cet été. Je voudrais savoir combien de déclarations je vais devoir remplir pour cette année ?

La règle est la déclaration commune pour l’ensemble des revenus dont ont disposé les époux, et ce pour l’année entière. Ils peuvent opter, s’ils préfèrent et pour une dernière fois, pour la déclaration distincte, comme un célibataire, en retenant chacun ses propres revenus et sa quote-part des revenus communs.